Les îlots de Fraternité

Comme  chaque année, depuis près de quarante ans, j’ai retrouvé après Noël le monastère de Lérins sur l’île St-Honorat pour faire le bilan de l’année écoulée et pour me rendre disponible à la nouvelle année, en préparant mon cœur et mon intelligence à de nouveaux commencements, à des choix renouvelés et à l’inouï d’une promesse de vie.

Ce rendez-vous régulier me permet de creuser le sillon au long court du service de la diaconie qui doit sans cesse s’adapter aux nouveaux défis de la précarité et de l’exclusion sociale, aux différents courants de pensée qui traversent la société civile et l’église locale et à l’évolution du monde associatif qui doit être capable de tenir ensemble la question du sens de son engagement, l’aptitude à gérer des institutions d’entraide et des ressources humaines, salariés et bénévoles, mais aussi le partenariat ou même le passage de relais avec d’autres acteurs tous aussi compétents. C’est une alchimie spirituelle qui ne va pas de soi pour rester en équilibre sur des lignes de crête ou de fractures de la société et de l’église… Il faut conjuguer sans cesse humilité et créativité, intériorité et engagement social, réalisme et non compromission, service de la fraternité et lutte pour l’accès aux droits humains fondamentaux.

Cette année, la semaine sur l’île St-Honorat, désertée par les retraitants et les touristes à cause de la crise de la Covid-19, fût marquée par un déchaînement des éléments de la nature. Les rafales de vent soulevaient les vagues de manière impétueuse : la tempête jouant avec les embruns, les rochers, et l’écume renvoyait sur le rivage des centaines de bois flottés venus d’on ne sait où pour échouer sur ce havre de paix consacré à l’hospitalité, la prière, la vie fraternelle, la réflexion, le travail manuel et la recherche de la vérité.

En contemplant ce spectacle impressionnant de la mer et du vent, jouant tantôt avec la lumière du soleil ou de la lune suivant les heures du jour ou de la nuit, je n’ai pu m’empêcher de méditer sur toutes les associations, initiatives et maisons de la diaconie, priant pour qu’elles restent comme cet antique monastère au milieu des tempêtes, des îlots de fraternité et d’intériorité, capables d’accueillir sur leur rivage tous ceux et celles qui tels des bois flottés ont traversé les tempêtes pour venir s’échouer sur des terres invitées à l’hospitalité.

Comment ne pas nous souhaiter à tous de faire de 2021 une bonne et sainte année, en prenant soin des relations, en redoublant d’attention pour ceux qui sont ballotés par les tempêtes de la vie et en servant joyeusement la fraternité ? Comment ne pas vous inviter à aller vous aussi vous ressourcer sur l’île St Honorat ou dans un autre lieu semblable pour enraciner dans le silence et le recueillement ces vœux de bonne santé physique, relationnelle et spirituelle ? C’est une bonne façon de prendre soin de soi-même et des autres.

Bonne année.

Diacre Gilles Rebèche.

(Photo DR site officiel Abbaye de Lérins)

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