Revue de presse : quelques spécificités de la migration
Groupe de théâtre composé des migrants de Calais présente la pièce « To be or not » à l’Université de Créteil. Crédit Secours Catholique
0Il aurait été facile – compte tenu de tout ce qui se dit et s’écrit sur le sujet brûlant de la migration – d’aligner quelques articles parmi les innombrables parutions de ces derniers mois. Nous avons préféré vous offrir une sélection de quelques sujets très particuliers liés à cet enjeu de société :
1 – Migrants et sida, la fin des idées reçues
2 – France-Parrainage et l’intégration des jeunes migrants
3 – L’association Cent pour Un et le le logement
4 – Quand le Pape François inspire Emmanuel Macron
5 – L’Etat va prendre en charge les repas des migrants
6 – Israël et les migrants africains
1 – La Croix – Mardi 23 janvier 2018 – Migrants et sida, la fin des idées reçues
Une enquête met à mal le mythe de « l’immigration thérapeutique » des patients africains qui, pour la moitié d’entre eux, ont été infectés après leur arrivée en France.
Migrants et sida. Voilà un sujet sensible, propice aux idées reçues et aux raccourcis. « Immigration thérapeutique », disent certains politiques. « Les Africains viennent en France pour se faire soigner », affirment aussi, à mots couverts, certains médecins. La réalité est bien plus nuancée, comme le montre une étude parue dans The Lancet Public Health. Un travail passionnant, mené sous l’égide de l’Agence Nationale de Recherche sur le Sida (ANRS) et de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). Et qui met en exergue une réalité dérangeante : les violences sexuelles subies en France par les femmes migrantes multiplient par quatre leur risque d’infection au VIH.
Cette étude est issue d’une enquête détaillée dans un livre paru l’été dernier (1). Cet ouvrage rappelle d’abord que, après les homosexuels masculins, les immigrés d’Afrique subsaharienne représentent le deuxième groupe le plus touché par le VIH en France. En 2013, parmi les 6620 patients ayant découvert leur séropositivité sur notre sol, 31 % étaient originaires de cette région. Quand et comment ont-ils été contaminés ? Et quel impact a eu leur parcours de vie et de migration sur leur comportement de prévention et de soins ?
Voilà les questions au cœur de l’enquête « Parcours » qui, en 2012 et 2013, a permis d’interroger près de 2 500 hommes et femmes : 926 personnes vivant avec le VIH, 779 porteuses d’une hépatite B et 763 n’ayant aucune de ces deux infections. Un travail au long cours dont le premier mérite est de torpiller l’image d’une épidémie « d’importation ». Dans près de la moitié des cas (44 %), ces hommes africains n’ont pas quitté leur pays pour être soignés en France. C’est après leur arrivée qu’ils ont été infectés par le VIH. Ce qui est aussi le cas d’un tiers (31 %) de ces femmes.
À quel moment ces personnes ont-elles été contaminées ? Le plus souvent durant les premières années de vie en France. Durant ces mois de forte précarité administrative et sociale. Sans titre de séjour ni logement stable. Voilà l’autre enseignement majeur de l’enquête. La vulnérabilité face au sida est très liée aux conditions de vie des migrants. « Les années de précarité sont aussi des années où la sexualité est plus à risque : toutes choses égales par ailleurs, les hommes et les femmes ont plus de relations sexuelles occasionnelles les années où ils n’ont pas de logement stable », soulignent les auteurs (1).
C’est particulièrement frappant pour les femmes qui, en situation de précarité, sont souvent exposées à des rapports non consentis ou à une sexualité transactionnelle. « En échange d’un hébergement, d’une aide matérielle ou par peur d’être expulsées », souligne Julie Pannetier, démographe, qui a participé à l’étude. « Les années où les femmes sont sans logement stable apparaissent associées à un risque de relations transactionnelles multiplié par 8 », relèvent les auteurs, en ajoutant que les femmes ayant été infectées en France sont quatre fois plus nombreuses à avoir déclaré ce type de relations.
Le sida, maladie de toutes les vulnérabilités. Éternel « révélateur social » selon l’expression de Daniel Defert, le fondateur de l’association Aides. Conclusion des auteurs de cette enquête qui fait date. « La première chose dont les immigrés ont besoin pour prendre soin d’eux-mêmes et se protéger du VIH/sida et autres risques sexuels, c’est de pouvoir y penser. Cela n’est possible qu’une fois (qu’ils sont) libérés de l’extrême insécurité, de l’angoisse liée à des démarches administratives lourdes et à l’issue incertaine, du souci d’avoir un toit pour dormir. »
Pierre Bienvault
(1) Parcours de vie et santé des Africains immigrés en France, sous la direction d’Annabel Desgrées du Loû et France Lert, La Découverte.
2 – La Croix – Lundi 22 janvier 2018 – Pour bien intégrer les jeunes migrants isolés
Jean-Marc Brunet, directeur général de France Parrainages, Francis Canterini, président de France Parrainages
Depuis 2007, la loi a clairement rappelé que tous les mineurs – sans distinction de nationalité – relevaient de la protection de l’enfance dès lors qu’ils étaient privés de leur famille, intégrant ainsi la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA) dans la compétence des départements (1). Il revient ainsi aux services de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) de leur apporter un accompagnement et de leur permettre d’accéder aux différentes formes d’autonomie : résidentielle, financière, administrative, ainsi qu’un accès à l’éducation et au marché du travail.
Mais des questions subsistent quant à la qualité de leur accompagnement et les raisons de l’échec de leur insertion. Pourquoi ces jeunes migrants, malgré une prise en charge dans de nombreux domaines, ne réussissent-ils pas leur intégration ? Un début de réponse se profile dans les pages d’un dossier publié par l’Observatoire National de la Protection de l’Enfance en février 2017.
On y remarque que « les professionnels chargés d’accompagner les jeunes étrangers isolés sont souvent pris par l’urgence des questions administratives… On néglige parfois au passage ce qui touche au parcours antérieur du jeune, son vécu, ses fragilités. Ses besoins psychiques, affectifs, relationnels peuvent vite passer au second plan, tout comme ses besoins d’être écouté, de penser son parcours, d’être informé, de s’exprimer sur sa situation, de s’approprier, ou non, ce qui lui est proposé. »
Lorsque des enfants fuient la répression, la misère ou l’exploitation dont ils sont les victimes, une prise en charge partielle ne peut suffire. L’accueil est décisif dans leur processus d’intégration.
Aujourd’hui, nous, associations et organisations de mobilisation citoyenne, proposons des solutions concrètes pour éviter à ces enfants de sombrer, une fois adultes, dans la précarité.
Les associations de parrainage, regroupées au sein du Réseau France Parrainages, viennent de publier une étude sur les apports du parrainage pour les mineurs non accompagnés, faisant état des nombreux bénéfices du parrainage de proximité. Grâce au soutien d’un parrain ou d’une marraine bénévole qui devient pour le jeune une figure d’attachement et qui va s’impliquer dans ses choix d’orientation et dans son projet professionnel, ce parrainage permet une meilleure insertion du mineur non accompagné.
Grâce à l’immersion dans la culture française, à l’apprentissage de la langue et des codes sociaux, son accompagnement par un parrain ou une marraine se veut facteur d’intégration. En proposant un cadre familial sécurisant, des repères stables contribuant à la construction de sa personnalité, le parrainage devient un facteur d’inclusion du jeune migrant dans la société, contribuant par là même à en faire un adulte engagé.
En luttant contre l’isolement et en créant un lien d’attachement sur la durée, le parrainage de proximité est avant tout un dispositif complémentaire de l’ASE. Complémentaire, mais surtout essentiel, pour éviter une recrudescence du nombre de jeunes marginalisés car isolés au sein des foyers d’hébergement.
(1) En 2017, 25 000 mineurs non accompagnés étaient recensés sur le territoire français
3 – La Croix – Vendredi 19 janvier 2018 – « Cent pour un » pour ne plus voir une seule famille à la rue
Dans les Deux-Sèvres, l’association 100 pour 1 récolte des fonds pour loger des familles de migrants.
L’idée est assez simple. Si 100 personnes s’engagent chacune à donner 5 € par mois, elles permettent de payer le loyer d’une famille pendant un an. « Peut-être pas en plein Paris, mais dans les Deux-Sèvres, c’est possible », affirme Gérard Nébas, président de l’un des groupes « 100 pour 1 » à avoir vu le jour récemment sur le sol hexagonal, ici dans l’agglomération de Niort. « Nous avons déposé nos statuts en septembre dernier et, juste avant Noël, nous avions déjà dépassé les 100 donateurs. Nous cherchons maintenant notre premier logement. »
100 pour 1 n’est ni un label ni une fédération, mais un modèle né en Touraine et qui a diffusé autour de lui. À Tours, l’initiative est partie d’un groupe d’amis, parmi lesquels des membres de l’association locale Chrétiens migrants. « Nous cherchions comment aider des familles déboutées du droit d’asile. Il fallait trouver une solution pour leur éviter la rue », expose Jean-Luc Morigny, secrétaire de cette première association proche d’Emmaüs et qui compte aujourd’hui près de 1 000 donateurs.
Le principe a essaimé là où, comme le dit Isabelle Brousseau depuis son bocage bressuirais, « on ne pouvait imaginer laisser des familles dormir dehors ». « Les Cada (Centres d’accueil de demandeurs d’asile) sont pleins et lorsque les migrants n’entrent plus dans les cases, où vont-ils ? », interroge la secrétaire de l’association née près de Bressuire (Deux-Sèvres) en 2016, et qui héberge déjà sept familles.
Reprenant l’idée de 100 pour 1, chaque nouveau groupe se crée de façon autonome. Celui de Niort a pour originalité de réunir des associations diverses, et quelquefois divergentes, comme la Libre-Pensée qui côtoie ici le Secours Catholique, la Cimade et la Ligue des droits de l’Homme.
« Lorsqu’il y a urgence, les différences s’estompent. Or, au printemps dernier, à Niort, l’État a cessé de payer l’hôtel à des demandeurs d’asile en attente de régularisation. Ces familles n’avaient plus de toit, or certains de leurs enfants étaient scolarisés. Lorsque les écoliers ont raconté que le petit camarade de classe arménien dormait dans une voiture, les parents d’élèves ont réagi et nous n’avons pas eu de mal à mobiliser. »
Le collectif d’associations a tapé aux portes des communes de l’agglomération niortaise et obtenu des logements pour ces familles, venues principalement des pays de l’Est.
« Mais le problème se renouvelle, ce pourquoi nous avons créé l’association 100 pour 1, qui se concentre sur la question du logement. Les militants des diverses associations que nous représentons ont par ailleurs un certain savoir-faire sur l’accompagnement des familles en situation de grande précarité », poursuit Gérard Nébas. À Niort, le groupe ne réserve pas son aide aux seuls étrangers sans papiers.
« Nous sommes prêts à loger toute personne dans le besoin, mais notre priorité va aux familles avec enfants. » Les dons arrivent, et, ici comme ailleurs, beaucoup remercient les créateurs de groupes Cent pour Un.
Agnès Marroncle (à La Rochelle)
Association 100 pour 1 en sud Deux-Sèvres, 10 rue Maurice-Ravel, 79000 Niort. Contact : [email protected]
4 – La Croix – Mercredi 17 janvier 2018 – Migrants : quand le pape François inspire Emmanuel Macron
EXCLUSIF – La Croix a pu interroger Emmanuel Macron dans l’avion qui le ramenait de Calais, mardi 16 janvier. Le chef de l’État est revenu sur la notion de « prudence », qu’il emprunte au pape François.
Le pape François serait-il le modèle d’Emmanuel Macron en matière d’immigration ? À la fin de son voyage à Calais, mardi 16 janvier, le chef de l’État a en effet emprunté au pape la notion de « prudence », lors d’un échange avec des responsables associatifs, à la préfecture.
Le représentant départemental du Secours Catholique, Didier Degrémont, l’avait d’abord accusé de mener une « politique d’inhumanité » (1), confiant ses espoirs déçus « de mesures qui transformeraient la force de la peur en force de la charité, comme l’a dit notre pape François. L’hospitalité n’exclut pas la prudence, ajoutait le responsable associatif, mais que de souffrances à vouloir étouffer cette réalité migratoire ».
« Je vous remercie d’avoir cité dans sa complétude la parole du pape, parce qu’en effet il a rappelé la prudence qui appartient au gouvernement, lui a répondu Emmanuel Macron. Et je crois que cet équilibre est celui dans lequel nous nous inscrivons. »
La « prudence » selon Macron
Dans l’avion qui le ramenait ensuite à Paris, Emmanuel Macron a précisé à La Croix son idée de la « prudence », confiant avoir reçu du nonce apostolique Luigi Ventura le « dernier texte du pape François sur les migrants », en l’occurrence le message du pape François pour la 104e journée du réfugié et du migrant.
« Je l’ai lu et j’ai écrit au pape François », assure le chef de l’État, sans rien révéler du contenu de cette lettre, qui n’est pas la première depuis leur conversation téléphonique, le 2 juin. « Cette prudence, c’est ce qui permet de rendre l’accueil des réfugiés acceptable pour la communauté nationale, précise le chef de l’État, assis en face du ministre de l’intérieur Gérard Collomb.
« Il faut aider les gens qui s’engagent pour les migrants, mais il y a aussi ceux qui, à Calais, subissent cette situation. Et ce sont souvent des classes populaires, qui ont peu de moyens. Je ne peux pas donner des leçons d’accueil à des gens qui vivent déjà des situations difficiles », nous confie le président.
En novembre 2016, tout en réaffirmant qu’« il n’est pas humain de fermer les portes », François mettait en garde contre le fait d’accueillir « plus qu’on ne peut en intégrer », estimant que « cela se paye aussi politiquement. »
Le refus du rejet de l’autre
C’est sans doute cela, la conclusion politique de ce voyage à Calais. La tentative d’Emmanuel Macron de maintenir l’équilibre entre « accueil digne » et « procédures accélérées », entre « hospitalité » et « prudence », n’a pas d’abord pour but de faire tenir ensemble des idées, mais les Français.
Durant ce voyage marqué par un soutien répété aux forces de l’ordre, le président a moins cherché à dessiner la cohérence d’un projet politique qu’à garantir « la cohésion d’un État ». Il l’a d’ailleurs dit « très franchement » aux associations : « Moi je ne veux pas que dans notre société des gens basculent dans le refus de l’autre et dans le rejet de l’autre. Si l’accueil de l’autre se fait sans ordre ou hors de la République, c’est ce qui se passera. Je ne veux pas non plus que, parce que nous sommes face à ces difficultés, nous oubliions nos valeurs. »
Un tel discours ferme donne sans doute au président plus de latitude politique pour, par exemple, mettre en œuvre l’aide alimentaire à Calais, alors que la maire LR de la ville Natacha Bouchart avait pris en mars dernier un arrêté, plus tard annulé par la justice, interdisant la distribution de repas aux migrants. Marine Le Pen avait obtenu 57,2 % des voix au second tour de la présidentielle à Calais.
Critique des « élites mondialisées »
Mardi soir, dans l’avion qui vient d’atterrir, Emmanuel Macron insiste encore sur le sens qu’il veut donner à son action : « Nous essayons de tenir un chemin de crête. Ceux qui prônent un accueil inconditionnel en France sont ce que j’appellerais de faux idéalistes. Les vrais idéalistes sont des pragmatiques qui prennent en compte ce que vivent les gens sur le terrain ».
« Lorsque certaines élites mondialisées expliquent, depuis Paris, que la France n’est plus un pays des droits de l’Homme, que les migrants sont chassés, mais de qui parlent-ils ? Des gendarmes et des policiers qui vivent sur le terrain et font leur travail jour et nuit, en 3/8. Eux, qui sont depuis vingt ans dans une situation intenable, ils vont devenir fous », prévient le président. « Mettez-vous à la place de ces gens qui rentrent le soir, et qui ont fait leur travail, pour que d’autres puissent dormir tranquillement. Et ça, on n’en parle jamais. Si je ne les entends pas, si je ne fais pas mon devoir, qui prendra la part ? Personne. »
La « tension éthique »
Le président n’évoque pas, en revanche, les témoignages de migrants sur la réalité de leurs conditions de vie. Certes, la journée avait commencé par quelques échanges avec des demandeurs d’asile du Sud-Soudan dans un centre de Croisilles mais, les prises de parole du président se focalisent sur les chiffres, les procédures ou le contexte des situations géopolitiques.
Une différence avec les interventions du pape François, souvent émaillées d’exemples concrets de ce que vivent les migrants. Emmanuel Macron assume : « Je ne multiplie pas les sujets biographiques, ça peut être un élément de facilité de là d’où je parle. Je crois ne jamais avoir baissé la garde sur le principe d’humanité toute la journée », se défend-il.
Le président souligne que le pape lui-même a dû atténuer son discours au fil des années : « Les premiers propos qu’il a tenus sur les migrants lors de son élection étaient plus ouverts qu’aujourd’hui. » Faisant référence au voyage à Lesbos, d’où le pape François était rentré avec des migrants, en 2016, le chef de l’État estime que « le pape a lui même vécu avec les catholiques sa propre tension éthique ». Une tension qu’il avait déjà mentionnée dans la journée face aux responsables associatifs. « On doit vivre avec », leur avait-il confié.
Mikael Corre, envoyé à Calais,
(1) Il reprenait les mots de l’avocat et écrivain François Sureau dans sa chronique parue dans La Croix le 2 janvier, Pas en notre nom !
(2) Message du pape François pour la 104e journée du réfugié et du migrant 2018
5 – Le Figaro – Mardi 16 janvier 2018 – Calais : les associations saluent la prise en charge des repas aux migrants par l’État
Les acteurs de terrain approuvaient l’annonce faite par le président de la République à Calais, mais les trois associations qui avaient annoncé boycotter la rencontre avec le chef d’Etat ont maintenu leur décision mardi.
C’était une demande de longue date des acteurs associatifs : lors de son déplacement de ce mardi à Calais, Emmanuel Macron a annoncé que l’État prendrait en charge la distribution des repas aux migrants sur place. Ce service, jusqu’ici assuré par les associations, sera géré par l’État «de manière organisée, avec des points mobiles, sans tolérer aucune installation de campements illicites», a déclaré le président de la République dans son discours devant les forces de sécurité.
«C’est une très bonne chose que l’État prenne en charge la distribution de repas», a salué le docteur Françoise Sivignon, présidente de Médecins du Monde. «Au même titre que l’accès aux soins et à un abris, l’accès à la nourriture est un besoin vital.» Mais les associations attendaient plus de détails sur la mise en oeuvre de ce dispositif. Emmanuel Macron a dit qu’il serait déployé «en incitant tous ceux qui sont prêts à financer cette prestation dans le cadre organisé par l’Etat et avec l’Etat», sans donner plus de précision.
Boycott maintenu
«C’est une très bonne chose», abonde Gaël Manzi, cofondateur et coordinateur d’Utopia 56. «Mais nous resterons vigilants sur leur façon de faire : il serait inacceptable que les distributions de repas se transforment en piège à migrants avec contrôle d’identité et enfermement à la clé.»
Les associations veulent aussi que les distributions se fassent dans des conditions dignes : «Il est question de mettre en place des dispositifs mobiles», note François Guennoc, vice-président de l’Auberge des migrants. «Ce n’est pas l’idéal, car cela signifie qu’on continuera à les faire dehors, dans le froid et sous la pluie.» Actuellement, Refugee Comunity Kitchen, Utopia 56 et l’Auberge des migrants estiment préparer environ 1200 repas pour deux distributions par jour.
Malgré l’annonce du président, les trois associations qui avaient annoncé lundi le boycott de la rencontre organisée avec Emmanuel Macron – Médecins du Monde, Auberge des Migrants et Utopia 56 -, ont maintenu leur décision mardi.
Le chef d’Etat a par ailleurs tenu des propos assez fermes à l’adresse de toutes les associations. Il les a appelées à la «responsabilité», déplorant les «mensonges» diffusés «par de trop nombreux» acteurs et «qui nuisent à notre efficacité collective». Pêle-mêle, Emmanuel Macron vise les associations qui «encouragent» les migrants «à s’installer dans l’illégalité, voire à passer» en Grande-Bretagne. Mais il se réfère aussi aux associations qui dénoncent des «violences policières» commises à l’encontre des migrants.
«Les maltraitances quotidiennes commises par les forces de l’ordre sur les exilés ne sont pas des mensonges», rétorque Didier Degremont, président du Secours Catholique à Calais. «C’est une réalité qui a été constatée par les journalistes, le défenseur des droits, Human Rights Watch…»
L’association a annoncé lundi avoir déposé une plainte contre X pour «dégradation de biens», après l’enlèvement et la destruction de couvertures, bâches ou tentes abandonnées par les migrants lors de démantèlements. D’autres associations regrettent le ton employé par le chef de l’Etat pour parler de leur action sur place. «Nous appeler à prendre nos responsabilités, c’est une vaste blague. Si les migrants ont quelque chose à manger jusqu’à maintenant malgré les carences de l’Etat, c’est grâce à nous.»
À mesure que la date d’examen du projet de loi immigration approche, les relations se tendent entre les associations et l’Etat. Le conflit se cristallise autour d’une circulaire permettant aux services de l’Etat d’examiner les «situations administratives» dans les hébergements d’urgence pour mieux orienter les étrangers selon leur situation. Mais les associations dénoncent un «fichage» et invoquent un principe «d’inconditionnalité de l’accueil» que ce texte remettrait en cause selon elles. Des associations ont saisi le Conseil d’Etat en référé pour demander le retrait de cette circulaire.
Edouard de Mareschal
6 – La Croix – Mercredi 10 Janvier 2018
Israël – Le gouvernement Netanyaou a décidé d’expulser au pas de charge 38 000 Africains entrés dans le pays illégalement. Les migrants restant se verront offrir un pécule de 3000 euros par personne s’ils acceptent de gagner d’ici avril le Rwanda ou l’Ouganda, prêts à les accueillir dit-on, malgré des démentis officiels. Il serait question de les expulser par charters, menottés et surveillés. Seuls épargnés, les mineurs et leurs parents, les malades et les plus de 60 ans.
En conclusion
« Humanité et dignité. Tous ceux qui redoutent les projets du gouvernements sur l’asile et l’immigration n’ont que ces deux mots à la bouche. Mais, est-ce bien humain de faire croire à des centaines de milliers de clandestins qu’ils trouveront un jour du travail et la sérénité chez nous ? Digne de les laisser s’entasser dans des camps de fortune, sans hygiène ni sécurité, sur nos trottoirs ou sur nos côtes ?
Il est grand temps que les prétendues belles âmes de la République se remettent en question. Certaines sont peut-être sincères, mais la plupart se font ainsi les comptables d’un odieux « fonds de commerce » qui se développe sur le dos des damnés de la terre… Quand on apprend la mort de migrants en Méditerranée, l’émotion pousse à la générosité. Mais pour que cette tragédie cesse, la raison commande d’en finir avec la politique des bons sentiments. »
Le Figaro – Jeudi 11 janvier 2018 – Editorial d’Yves Thréard (extraits).
Cette revue de presse a été effectuée par Roger Diez, bénévole à l’UDV. Les articles ont ensuite été sélectionnés par Aline Racheboeuf, auteure bénévole à IOTA.