La renaissance de Solidarités Cœur du Var

Il y a dans la nature des plantes magnifiques : elles ont éclos, grandi, fleuri pour notre plus grande joie. Et puis, elles ont petit à petit diminué : moins d’éclat, moins de parfum, comme si leur mission de nous enchanter devait prendre fin. L’automne et l’hiver sont passés par là… et puis, tout d’un coup, un jour, quelque chose de vert est réapparu parmi les herbes jaunies… et l’émerveillement peut recommencer !

Il y a dans l’immense jardin de l’UDV des histoires analogues, comme celle que nous vous contons aujourd’hui par les mots de Françoise Garrigue, secrétaire de l’association Solidarités Cœur du Var.

La maison Phanuel, à Gonfaron

A l’origine, il y avait à Gonfaron un très gros projet, la construction de la Maison Phanuel réalisée par Habitat & Humanisme et les Amis de Phanuel, devenus Solidarités Cœur du Var (Solcovar) en 2008. Cette maison familiale, inaugurée en 2014, devait être une étape pour 25 personnes en grandes difficultés qui réapprendraient le vivre ensemble dans des logements autonomes avant de pouvoir retrouver une vie normale. Solidarités Cœur du Var s’est beaucoup investie dans sa mise en œuvre, mais, après l’inauguration, il y eut une diminution de l’activité, comme si la mission qu’elle s’était donnée – et qu’elle avait menée à bien – était accomplie.
Cependant, pour ses membres, il n’était pas question de dissolution, mais peut-être de trouver un autre projet qui serait repris par de nouvelles bonnes volontés.

Comme une sorte de renaissance…

Dès son arrivée comme curé de Pignans, en septembre 2018, le Père Jean-Paul Trézières (qui était précédemment à la Chancellerie de l’Évêché) demandait aux supermarchés environnants la possibilité de récupérer les invendus. Toujours très proche des gens et très actif en ce sens, il avait en plus des séminaristes en pension à la paroisse. Cette aide alimentaire fournie sous forme de colis hebdomadaires aux familles en difficulté reçut très vite un excellent accueil.
En février 2021, au Presbytère de Pignans, eut lieu une réunion un peu particulière, avec le P. Trézières, Gilles Rebêche, Thierry O’Neill, président de l’UDV, Jean-Michel et Françoise Garrigue. L’action initiée par le P. Trézières trois ans auparavant était devenue caritative, il semblait logique de constituer une association. Le réseau de connaissances et aussi les nombreuses affinités qui s’étaient révélées entre les participants aidèrent sans mal à concrétiser la discussion.
Le 9 avril 2021, le P. Trézières convoqua une première Assemblée Générale extraordinaire avec l’élection d’un Bureau : Jean-Michel Garrigues devenait Président, Françoise Garrigues secrétaire et Frédéric Rouaze, séminariste, acceptait le poste de Trésorier, au vu de ses compétences en matière de comptabilité. Tout normalement, ce bureau était élargi aux personnes déjà impliquées dans l’action initiée par le P.Trézières, et le siège de l’association s’établissait au Presbytère de Pignans. L’ensemble des anciens membres participait aux débats en visio-conférence : tous ont alors encouragé à reprendre l’action sous cette autre forme, et chacun a pu choisir de rester ou non dans la nouvelle structure, la Maison Phanuel à la naissance de laquelle ils avaient si bien travaillé n’ayant plus besoin d’eux. On ne peut que les remercier chaleureusement pour leur implication dans cette formidable réalisation.

Une action centrée sur l’aide alimentaire

Pour commencer, on décida de limiter l’action au Coeur du Var. Derrière cette appellation, se cache une communauté de communes totalisant plus de 42 000 habitants sur 45 000 hectares : Besse-sur-Issole, Cabasse-sur-Issole, le Cannet-des-Maures, Carnoules, Flassans-sur-Issole, Gonfaron, Le Luc-en-Provence, Les Mayons, Pignans, Puget-Ville et Le Thoronet.

La pauvreté s’est installée partout…
Et non seulement elle est partout, mais tous les jours on en découvre de nouvelles formes. Il y a bien sûr les mamans isolées qui n’arrivent plus à tout assumer quand les enfants grandissent. Il y a ce qu’on peut appeler « les petits propriétaires » : des gens qui avaient un emploi, une famille, un logement dans des agglomérations importantes : pour s’éloigner et vivre dans une ambiance moins stressante, ils se sont lancés dans l’achat d’un bien « à la campagne ». Mais ils se sont retrouvés relativement vite en difficulté : divorce parce que l’un des deux ne parvenait pas à s’adapter… chômage, la bête noire qui rôde un peu partout, et peu d’emploi dans le secteur… accident, car faire la route matin et soir n’est pas sans risque…maladie d’un des parents ou d’un enfant nécessitant des allers-retours à l’hôpital toujours trop éloigné… De plus, il n’y a que la gare de Carnoules pour desservir ces communes, et aucun transport en commun. Et dans les villages, on ne trouve plus ou presque de petits commerces de proximité, les supermarchés ont été construits à l’extérieur : alors, comment fait celui qui n’a pas ou plus de voiture ?
Il y a aussi les veuves d’artisans : les maris ont souvent travaillé à des tarifs minimum, ne faisant pas payer par gentillesse, se faisant payer en nature (produits locaux). Ils n’ont donc pas eu de retraite suffisante, et par conséquent les pensions de réversion sont bien modiques. Pour toutes, l’essentiel est d’avoir un toit (leurs logements vont d’ailleurs en se dégradant). Par fierté, on ne se livre pas – on a juste de quoi manger, et encore, après les factures habituelles. Les enfants, et tous ceux qu’on appelle « les proches » se sont éparpillés, comme le veut la vie d’aujourd’hui…Ces retraités, aux revenus souvent limités, apprécient toujours ce qui leur est donné, comme les chocolats de Pâques, par exemple !
Nous n’avons pas à juger qui est pauvre, ni comment et pourquoi il se retrouve dans une telle situation. Celui qui vient chercher un colis vient peut-être aussi pour autre chose de plus personnel ou de plus social. Avec le temps et les épreuves, le tissu relationnel s’est effrité, la solitude engendre l’isolement, le repli sur soi. Pour les bénévoles, donner un colis, c’est aussi être à l’écoute et poser un regard fraternel sur « l’autre ». La crise sanitaire ne facilite pas les actions mais tout le monde s’adapte en essayant une organisation la plus logique qui soit, une proximité réelle et efficace.

Un service « zéro déchet, zéro gaspillage »…

Plusieurs supermarchés des alentours jouent le jeu : Hyères, Brignoles, Gonfaron, Carnoules. Ils donnent les produits qui arrivent à la date limite de consommation, et les bénévoles sillonnent les routes pour récupérer. Un ou deux séminaristes font de même.
Dans le respect absolu des règles d’hygiène et de sécurité, on rapporte à Pignans produits laitiers, boulangerie, barquettes de viande, de poisson, de salades. Les fruits et légumes viennent de Carnoules principalement. Le congélateur du Presbytère est vite rempli.
Le P. Trézières veille lui-même à la distribution, avec Isabelle, bénévole bien connue dans le village où elle est auxiliaire de vie. Son mari, retraité, livre les colis aux personnes âgées ne pouvant se déplacer, ou à des personnes qui ne tiennent pas à se montrer. Deux bénéficiaires ont souhaité donner de leur temps, c’est pour eux une façon de dire merci pour ce qu’ils reçoivent.
Il n’y a pas non plus de gaspillage : ainsi dernièrement, une personne qui avait été aidée par un proche a laissé son colis pour une autre personne. La solidarité, c’est aussi le voisin d’en-face qui vient aider les bénévoles à décharger leurs voitures au retour de la collecte, c’est la personne qui vient une fois par semaine chercher les cartons pour les porter au recyclage. C’est aussi la générosité des deux boulangers de Pignans, très sensibles à ce qui est réalisé.
On trie les marchandises avant de les donner, il y a toujours un peu d’abîmées. Et celles qui ne peuvent être données sont prises par des personnes qui ont des poules !
Car (petit intermède), la Communauté de Communes Cœur du Var a proposé à 100 foyers motivés d’acheter un poulailler (pour 2 ou 3 poules) pour seulement 35 euros ! Récolte assurée d’œufs frais et surtout réduction considérable des déchets. Il paraît que 2 poules peuvent « détourner » 300 kilos de déchets par an et par foyer !!!
A Pignans, 26 colis alimentaires sont distribués une fois par semaine, le jeudi après-midi. Leur contenu est réalisé en fonction des familles, nombreuses ou non, et constituent un complément à ce qu’elles peuvent se procurer par elles-mêmes. A Besse, ce sont 12 familles qui viennent régulièrement, la distribution est faite dans un local mis à disposition par la Mairie le mercredi après-midi. Les colis sont préparés à Pignans et emportés ensuite. Les colis sont nominatifs, on fait attention aux régimes, aux allergies, ainsi il est sûr que tout le contenu en sera utilisé par le destinataire. Tout le stock de nourriture part d’une semaine à l’autre.
C’est pour cela qu’un appel aux dons a été lancé pour permettre l’achat d’un véhicule frigorifique : avec la chaleur qui arrive, c’est indispensable. Il faudrait aussi avoir un endroit climatisé au Presbytère pour entreposer les produits.

« Nous avons besoin d’un cœur à cœur… »

Ce Dimanche de Pentecôte, à la Collégiale de Pignans, c’étaient les Premières Communions, il y avait beaucoup de monde. Jean-Michel Garrigue, Président, a présenté l’association à la fin de la Messe et lancé un appel dont voici le texte :
« Bonjour à tous ! Sous l’impulsion du Père Jean-Paul Trézières, nous avons repris une association qui s’intitule SOLIDARITES CŒUR DU VAR-UDV. Notre vocation consiste à aider les plus démunis, les plus défavorisés, de nos communes de Pignans et Besse, en leur apportant un soutien alimentaire toutes les semaines en fruits, légumes, pain et produits laitiers. Notre association est régie par la Loi 1901, elle est une composante de l’Union Diaconale du Var : cela nous permet d’obtenir un cadre juridique fiable et de recevoir par l’intermédiaire de cet organisme (l’UDV), des dons ou des legs donnant lieu à défiscalisation à hauteur de 66 %. Notre association compte actuellement une équipe de bénévoles chargés
– De collecter les denrées auprès des supermarchés et magasins locaux,
– De préparer les colis à distribuer au cours de la semaine suivante.
A ce jour, nous soutenons 50 familles environ sur les 2 communes ; familles qui sont adressées par le CCAS de la commune ou qui se présentent directement auprès du P. Trézières. « Partager, échanger, aider », cette exhortation du Pape François est toujours d’actualité en 2021. La crise sanitaire que nous sommes en train de vivre met encore plus en évidence le lien social et fragilise les plus faibles. Pour faire briller chaque jour le soleil dans la vie des personnes que nous accompagnons, notre association compte sur vous, et notre souhait, bien sûr partagé avec le Père Jean-Paul, consiste à vous compter parmi nous en tant qu’adhérents moyennant une somme modique de 10 euros par personne. Cette somme, vous pouvez la verser directement à notre association – Françoise, mon épouse se tiendra à la sortie de l’église – mais aussi la déposer ultérieurement au Presbytère. Je conclurai par deux citations de Pierre Teilhard de Chardin (prêtre, paléontologue), extraites de ses ouvrages, essais philosophiques et théologiques dont « LE PHENOMENE HUMAIN » en 1970, qui résument le sens même de notre vocation tournée vers l’être humain : « Ce n’est ni d’un tête à tête, ni d’un corps à corps que nous avons besoin, mais d’un cœur à cœur… Nous ne sommes pas des êtres humains vivant une expérience spirituelle, mais des êtres spirituels vivant une expérience humaine. »
Je vous remercie pour votre attention et par avance pour votre participation. »

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Voici maintenant le flyer distribué à la sortie :

SOLIDARITES CŒUR DU VAR UNION DIACONALE DU VAR
Solidarités Cœur du Var – UDV est une association loi 1901 d’intérêt général, nouvellement implantée sur la commune du Pignans. Sous l’impulsion de Monsieur le Curé des paroisses de Pignans, Besse-sur-Issole et Brue-Auriac le Père Jean-Paul Trézières et avec le soutien de nos partenaires de la grande distribution, les commerçants locaux et les bénévoles de l’association, nous assurons la distribution de colis alimentaires aux personnes défavorisées des communes du territoire Cœur du Var. Aujourd’hui déjà de nombreuses familles et personnes isolées habitant les communes de Pignans et de Besse- sur- Issole bénéficient de cette aide alimentaire. Or, le nombre de personnes dans le besoin sur le territoire est en augmentation et nos frais de logistique ne cessent de s’accroître. Il sera également nécessaire, avec l’arrivée des beaux jours, de nous procurer un véhicule frigorifié pour assurer le transport en toute sécurité des denrées périssables.
Pour ces raisons, nous sollicitons votre soutien pour que nous puissions continuer à subvenir aux besoins des personnes nécessiteuses. Nous vous invitons à adhérer à notre association (10€/an) ou à faire un don, déductible des impôts.
Le bureau, les membres et les bénévoles de l’association Solidarités Cœur du Var-UDV vous remercient d’avance pour votre générosité.
Le Président de Solidarités Cœur du Var – UDV, Jean-Michel Garrigue.
Pour adhérer ou faire un don à l’association : Merci d’adresser vos chèques à l’adresse suivante :
Le Presbytère, 8 Place de la Mairie, 83790 PIGNANS
Nom et prénom :
Adresse :
Adresse e-mail :
Adhésion 2021-22 : 10€ chèque à l’ordre de Solidarités Coeur du Var – UDV.
Don : chèque à l’ordre de Union Diaconale du Var.
Nous vous adresserons une carte d’Adhérent, et pour les dons l’UDV vous délivrera un reçu fiscal.

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Le résultat a été assez fructueux, nous dit Françoise Garrigue, car déjà, le lendemain, au Sanctuaire de Notre-Dame des Anges, lors de la Messe du Lundi de Pentecôte, 6 personnes avaient déjà préparé leurs cotisations. Sur une vingtaine de participants à la célébration, c’est un joli début !
Comment opérer une extension de cette activité ? Il faut y aller avec beaucoup de prudence si l’on ne veut pas être débordé et risquer de dénaturer le but même de l’action. Comme le disait le Pape François, « Ce voyage du coeur aux mains » est une découverte permanente.
Ainsi, l’équipe caresse un « petit projet » : composer des fiches de cuisine pour redonner aux gens l’envie de se faire plaisir, de créer petit à petit quelque chose qui les valorise, car la pauvreté entraîne le dégoût de bien des choses. Remotiver les femmes semble une idée intéressante : le moral de la mère de famille rejaillira sur toute la famille !

Pour terminer, gardons en mémoire ce passage du dernier billet de Gilles Rebêche :
« La positive attitude exige de cultiver une vie intérieure, de voir les choses dans leur ensemble, de les mettre en perspective en laissant résonner en soi le positif de la vie donnée. On peut ainsi, même dans la pire des situations, garder la conviction que le bonheur reste à portée de mains, si l’on renonce à se complaire dans la plainte, la frustration ou même la victimisation. »
« Après que le Seigneur m’eut donné des frères, personne ne me montra ce que je devais faire… » parole d’un autre Diacre qui voulut rester Diacre au service de ses frères.

Aline RACHEBOEUF


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