« Est-ce que tu me reconnais ? »

« Du milieu de la foule, lors de l’inauguration des LAM (Lits d’Accueil Médicalisés), cette question m’était adressée par Abdel, résident depuis quelques semaines de l’étage de l’hôpital Léon Berard de Hyères dédié à ces LAM, gérés par Promo Soins – UDV. Bien sûr que je l’avais reconnu même si j’étais le premier surpris à le retrouver en ces lieux .

On s’était connu il y près de quarante ans sur le terrain paroissial de la Coquette où il avait été hébergé « provisoirement » par le curé de l’époque comme gardien des lieux.

Avec la création du Samu Social il avait hérité d’une petite caravane pour améliorer son logement de gardien.

Toujours aimable et discret, Abdel était devenu comme l’hôte des lieux, souriant et prévenant pour tous, prenant soin des espaces verts et des fleurs, pour que ce lieu où s’entassaient les situations de misère reste comme un jardin accueillant. Après le départ de l’hébergement d’urgence du Samu Social transféré aux Favières pour une mise à l’abri plus décente, Abdel était devenu le gardien du lieu de stockage des meubles et objets qui donnèrent naissance à La Ressourcerie de la Rade – UDV. Quand cette dernière eut pignon sur rue à Danton, les locaux de La Coquette devinrent le pôle culturel de la Diaconie avec Kaïré -UDV, Les clowns de Nez’ Vangile et le collectif La parole des Sans-voix. Abdel, une fois encore, y trouva sa place et son utilité sociale. Malheureusement, les préjudices de l’avance en âge durent l’obliger à accepter une hospitalisation forcée : glaucome à l’œil droit et AVC. Comment donc cacher la joie de le voir réapparaître dans une fête avec cette question «  Me reconnais-tu ? ».  J’ai accueilli cette question comme la question importante des 40 ans de la Diaconie. En effet, ils sont nombreux comme Abdel, Patrick, Michel, Fathi, Marius, Negra et Fraco, Christian, Yvonne, Aziz, Arlette, Jeannette et tant d’autres… Ces hommes et ces femmes de l’ombre, humbles artisans de fraternité et de lien social qui méritent toute notre reconnaissance et notre estime publique. Ils ont été comme Abdel les jardiniers du bonheur d’être ensemble, malgré les galères et les tuiles de l’existence.

Je me suis mis à rêver que célébrer les 40 ans de la Diaconie serait en priorité la reconnaissance rendue à toutes celles et ceux qui ont permis à cette aventure entre Terre et Ciel d’être une réalité aux multiples visages : visages de petites gens, de militants de l’espérance, de mendiants d’amitié, de bénévoles généreux et fidèles, de salariés zélés et motivés, de volontaires civiques, venant parfois d’au-delà de l’hexagone, de demandeurs d’asile courageux et déterminés, de croyants pratiquants l’œcuménisme de la charité, de responsables associatifs consentant à insérer la Providence dans leurs budgets prévisionnels et la convivialité dans leurs assemblées générales… Bref, d’hommes et de femmes de bonne volonté, ouvriers du bien vivre ensemble.

En quittant Abdel à Léon Berard et en le félicitant de son dynamisme retrouvé, il me répondit avec un naturel déconcertant « c’est Dieu qu’il faut remercier ».

Merci à Abdel et à tous les témoins de la reconnaissance de faire de chacun de nous des apprentis de l’universelle fraternité… Capables de gratitude mutuelle, entre Terre et Ciel.

Belle fête des 40 ans ! »

Diacre Gilles Rebèche.


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