L’UDV en chemin vers l’écologie intégrale

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Le 12 juin dernier à Toulon, le service formation de l’UDV, en partenariat avec le Conservatoire du Littoral et le Pèlerin, a organisé un colloque sur l’écologie. Rassemblant de nombreux acteurs associatifs bénévoles et salariés de différents horizons et aussi de « simples » citoyens, la rencontre a permis de faire réfléchir les uns et les autres pour les conduire sur la voie de l’écologie intégrale.

« Concilier écologie sociale et environnementale dans nos pratiques associatives et pédagogiques » : le thème de la journée était ambitieux ! Pour tenter d’éclairer la centaine de participants sur cette question de l’écologie, le service formation de l’Union Diaconale du Var avait « convoqué » 3 intervenants de qualité.

Gilles Rebêche, diacre, sociologue et animateur de la Diaconie du Var a assuré le fil rouge de la journée. A ses côtés, 2 autres intervenants ont pris la parole : Dominique Lang, prêtre assomptionniste, journaliste au Pèlerin et aumônier national du mouvement Pax Christi ; Et François Fouchier, délégué régional Paca au Conservatoire du Littoral et membre actif de l’Eglise Protestante Unie.

Gilles Rebêche a pris la parole en premier :

« L’encyclique Laudato Si écrite par le Pape François et consacrée à l’écologie nous enseigne que nous devons être des militants de l’espérance. Ce texte a permis de faire la jonction entre les militants environnementaux et sociaux. Venant du Grec « oikos », qui signifie la maison, le domicile, l’écologie nous propose d’habiter notre maison commune, en l’occurrence la Terre.

Nous sommes en chemin et nous devons avoir une réflexion d’itinérants. Puisse cette journée nous montrer combien les questions environnementales et sociales sont intimement liées » a-t-il indiqué, avant de céder la parole à Dominique Lang.

« Repérer les cellules souches »

En guise de propos liminaire, Dominique Lang a évoqué la naissance de sa conscience écologique, à la faveur d’une rencontre avec Fabrice Nicolino, journaliste au magazine Terre Sauvage. Puis il a développé son propos :

« Il est aujourd’hui évident et communément admis que nous sommes confrontés à une crise écologique. Les Chrétiens, comme les autres citoyens, sont attendus sur cette question. Tout est lié, interdépendant : il faut rapprocher nos églises, les croyants et le respect de la nature. Des mots qui ont trait à l’environnement et au respect de la création existent, tels que sauver, réconcilier, faire alliance etc.

Aujourd’hui plus que jamais il faut que nous repérions les cellules-souches dont parle Edgar Morin. Pour lui, les cellules-souches sont tous ces individus, simples citoyens, militants ou scientifiques, qui décident un beau jour de sortir de l’anesthésie collective pour se mettre au service de ce qui était considéré jusque-là comme dû et sans valeur, le monde naturel dans sa diversité et ses grands équilibres.

La Conférence de Paris de 2015 sur les changements climatiques, plus connue sous le nom de COP 21, a donné naissance à la notion de justice climatique. Cette justice climatique, c’est à chacun de nous que revient la responsabilité de la faire respecter.

Laudato Si est un texte générationnel au sein duquel le Pape François accorde une importance toute particulière à l’écologisme des pauvres, dont nous pouvons tirer des enseignements. A travers leurs comportements, les pauvres changent le capitalisme !

Il me semble important de noter 7 points ou recommandations :

  • Conserver notre capacité d’émerveillement, rendre grâce pour la beauté du vivant, de la création toute entière.
  • Faire preuve de lucidité et regarder le monde tel qu’il est.
  • Pour les croyants : se souvenir que Dieu nous a créés, avoir foi en Dieu créateur.
  • Etre contre-culturel : résister au système qui s’emballe.
  • Promouvoir une écologie intégrale : analyser les conséquences de nos actes.
  • Pour les Chrétiens : aller voir où l’Esprit saint est à l’œuvre, aller rencontrer les cellules-souches.
  • Essayer d’être le plus cohérent possible : dans nos vies, nos choix… ».

Accepter une humanité hors-sol ?

Ensuite, c’est François Fouchier qui a pris la parole :

«Sommes-nous prêts à accepter une humanité hors-sol ? Comme l’a si bien écrit Antoine de Saint-Exupéry, nous n’héritons pas la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. Un des remèdes à la crise écologique se trouve sans doute dans le fait que nous pouvons être heureux tout en vivant sobrement. La prise de conscience, la notion de responsabilité sont très importantes.

Il est clair que nous ne maîtrisons pas la nature : le sentiment de toute puissance humaine est illusoire. Il s’agit de convertir la culpabilité en responsabilité, et nous devons sortir de l’inhibition collective. Aujourd’hui, de nouveaux modèles apparaissent sur nos littoraux comme ailleurs, tel que le bateau partage, le covoiturage…  En matière d’environnement et de justice climatique, la solidarité Nord-Sud et non la rivalité est essentielle.

Dans ses écrits, le sociologue et théologien Jacques Ellul préconise la non-puissance, en opposition avec la toute-puissance. Selon lui, il s’agit de renoncer à l’utilisation de notre puissance. Précurseur, le célèbre physicien Albert Einstein déclarait : Notre époque se caractérise par la profusion des moyens et la confusion des intentions. Cette phrase entre en résonance avec notre monde actuel.

Aujourd’hui, la sagesse, la prudence devraient nous inciter à tenter le renoncement.

Après les prises de parole des 3 intervenants, les participants ont pu poser des questions.

Parmi eux, Guy Rebec, seul élu écologiste au sein du conseil municipal de la ville de Toulon. Selon ce dernier, rompu au « militantisme vert », il n’y a que 2 instances qui peuvent « faire plier » l’Etat ou une collectivité : l’Europe et la société civile. Ceci ne peut que responsabiliser encore davantage les citoyens que nous sommes.

Nous autres citoyens pouvons mettre en œuvre le principe paradoxal de « non-puissance active ». Enfin, la jonction entre les acteurs de la solidarité et les environnementalistes est en train de se réaliser.

Présentation du Conservatoire du Littoral

Après une pause déjeuner méritée, un après-midi d’échanges et de réflexion a débuté avec une nouvelle intervention de François Fouchier. Représentant son institution, il en a profité pour présenter le Conservatoire du Littoral :

« Le Conservatoire du Littoral est une spécificité française. Il est à l’environnement ce que le musée du Louvre est à la culture. Créé en 1975, il détient 40.000 hectares en Provence Alpes Côte d’Azur.

Son objectif est de mettre des parcelles à l’abri après les avoir rachetées. Une fois qu’ils ont été acquis, les biens rachetés deviennent inaliénables. Nous travaillons pour l’éternité ! Le territoire n’est pas une simple marchandise : il s’agit d’un patrimoine commun relevant presque du « sacré ».

Parmi les exemples que je souhaite mettre en avant, il y a le Domaine de Fabrégas, à la Seyne-sur-Mer, où des détenus en fin de peine sont libérés le temps d’une journée pour venir y travailler. Il y a aussi la Calanque de Port d’Alon, à Saint-Cyr-sur-Mer, que nous avons rendue accessible pour les personnes porteuses d’un handicap.

L’homme, comme la nature, les végétaux ou les animaux ne peut pas vivre hors-sol : nous avons besoin d’être enracinés dans un terroir, un terreau. Le pays je guérirai est-il écrit dans la Bible ».

« Si mon peuple sur qui est convoqué mon nom s’humilie, prie, et cherche ma face, et s’il se détourne de ses mauvaises voies, je l’exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays. » 2 Chroniques 7:14

Dominique Lang s’est ensuite à nouveau exprimé : «En ce qui concerne notre rapport à la nature, une étude publiée dans la prestigieuse revue Science démontre les bienfaits que procure le fait de vivre près d’un jardin.

Il n’y a pas si longtemps, la population française était majoritairement rurale, or aujourd’hui 80% de la population vit en zone urbaine : il s’agit d’un basculement fondamental !

Du point de vue historique, le concept de développement durable ou soutenable est apparu pour la 1ère fois en 1987 avec le rapport Brundtland, officiellement intitulé Notre avenir à tous, rédigé par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement des Nations Unies.

Depuis, les idées écologistes sont peu à peu entrées dans les têtes. Aujourd’hui, avec d’autres Chrétiens concernés par ces questions je plaide en faveur du développement du label Eglise verte. Ainsi, demain, on pourrait trouver dans nos églises des bougies, du vin et des hosties bios…

En ce qui concerne l’interreligieux, je suis persuadé que la crise écologique est le plus gros chantier œcuménique des années à venir ».

Groupes de travail

Suite aux interventions des 3 conférenciers, les participants ont été invités à se réunir en petits groupes pour échanger sur 3 questions :

  • Qu’est-ce que je retiens d’important ?
  • A quel processus de conversion écologique je me sens appelé ?
  • Quelle personne cellule-souche ai-je envie de rencontrer ?

Nous avons compilé quelques réactions issues des différents groupes de partage.

« L’écologie nous touche au quotidien, elle nous touche tous, elle touche toutes les générations. Tout est lié et interdépendant, comme l’effet papillon semble le prouver. Les accords nationaux et internationaux sont nécessaires et complémentaires de l’action individuelle. Notre prise de conscience doit être globale, intégrale, nous devons faire preuve de lucidité et exercer notre responsabilité. Les cellules-souches sont le moteur de l’espérance. Nos contemporains sont en recherche de sens face au paradoxe de la société actuelle. Il est très difficile d’être cohérent mais pas de déprime, nous devons avant tout nous émerveiller ! Nous devons créer du lien, partager et ne pas nous isoler pour arriver à faire ensemble. La communauté chrétienne doit nécessairement s’impliquer pour promouvoir l’écologie intégrale. Les paroisses doivent peu à peu se responsabiliser et converger vers l’application du label Eglise Verte. L’écologisme des pauvres est une notion importante. L’effet de levier : 11% d’une population peut faire basculer l’opinion et ainsi entraîner le changement, nous avons besoin de nous nourrir intellectuellement en nous cultivant, les questions sociales et écologiques sont intimement liées, la promotion du lien social et le respect de la biodiversité vont de pair. Il ne faut pas hurler avec les loups mais être capable de regarder les choses en face.

Chacun de nous peut être ambassadeur pour insuffler des initiatives et des prises de conscience qui œuvrent en faveur de l’écologie. Nous nous sentons appelés par le durable et le recyclable, et non par le jetable. Comment agir pour le respect de l’environnement au sein de chacune de nos associations ? Privilégier la proximité, le local, les circuits courts. Accepter de prendre le temps, être patient, ralentir, respecter le vivant, être à l’écoute des innovations, favoriser l’intelligence collective et la gouvernance partagée, promouvoir le concept d’entreprise libérée pour se libérer des carcans du vieux monde, arrêter l’utilisation et la consommation du plastique, favoriser les modes de transports doux et l’éco-mobilité, nettoyer les déchets, développer le label vert au sein de nos structures, se laisser interpeller, accueillir avec attention ce que pense l’autre, pratiquer la non-violence dans notre rapport aux autres et au monde qui nous entoure…

Nous souhaiterions pouvoir rencontrer Pierre Rabhi (pionnier de l’agroécologie en France) et son mouvement Les Colibris, Gaël Giraud (prêtre jésuite et économiste de renom), le Pape François, les acteurs locaux qui agissent au sein des recycleries, le réseau de la diaconie et ses jardins solidaires, le maître composteur dont Dominique Lang nous a parlé, rendre visite à un éco village chrétien …

Une question récurrente se pose à nous : suite à cette journée, que va-t-on faire pour se mettre au vert dans les associations membres de l’UDV ?

En guise de conclusion, chacun des 3 intervenants a prononcé une pensée qui lui est propre, sous forme d’interpellation :

« Etre écologiste, c’est être reconnaissant de la vie que l’on reçoit » (D. Lang), « Pour respecter le vivant, nous avons un acte de résistance à poser » (F. Fouchier), « Où es-tu ? Qu’as-tu fait de ton frère ? Comme il est écrit au début de la Bible » (G. Rebêche).

Par Christophe Parel, responsable communication de l’UDV.

Pour aller + loin

Voir le documentaire La fabrique du consentement diffusé récemment sur Arte. 

Lien vers le blog Eglises et écologies
https://eglisesetecologies.com/

Lien vers le site Eglise verte
https://www.egliseverte.org/

Lien vers le site du Conservatoire du Littoral
http://www.conservatoire-du-littoral.fr/


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