« Enserrer le monde dans un réseau de charité » : vision d’espérance de la Société Saint Vincent de Paul

Depuis 185 ans, la société Saint Vincent de Paul (SSVP) déploie à travers le monde un réseau de bénévoles qui œuvrent au service des personnes seules ou démunies. Actuellement présente dans 135 pays, l’association compte 700 000 membres dont 17 000 en France.

La solidarité est une exigence de la vie en société, un moyen de garantir une certaine stabilité. Pour lutter contre les détresses sociales qui sont de toutes sortes, le soutien matériel et financier bien que nécessaire ne suffit pas. Etre solidaire est un état d’esprit, une manière d’être, une façon de tisser des relations, dans le respect et la réciprocité. C’est ce souci de l’Homme, de tous les hommes, et en particulier des plus fragiles, que la société Saint Vincent de Paul porte depuis bientôt deux siècles.

Un engagement effectif des chrétiens au service des pauvres

Organisation de bienfaisance catholique et laïque, la société Saint Vincent de Paul a été créée par Fréderic Ozanam en 1833. Alors étudiant à la Sorbonne, il participe à des soirées de « débats » où lui est adressée cette diatribe : « Le christianisme a fait autrefois des prodiges, mais aujourd’hui, il est mort. Vous vous vantez d’être catholiques, que faites vous ? Où sont les œuvres qui démontrent votre foi et qui peuvent nous la faire respecter et admettre ? » Un reproche qui sonne comme une alarme et éveille en Frédéric Ozanam le souci de mettre en actes ses convictions évangéliques. C’est ainsi qu’il fonde avec quelques amis une petite société qui se dévoue auprès des plus pauvres. Société toujours pérenne et encore grandissante deux siècles plus tard.

Frédéric Ozanam crée la Société Saint Vincent de Paul en 1833

« Rendre visible les invisibles »

La pauvreté prend aujourd’hui des formes multiples, et toujours nouvelles. Pauvretés matérielle, affective, physique, sociale… parmi elles : la solitude. Phénomène grandissant de ce XXIème siècle, celle-ci expose davantage aux difficultés de la vie. La lutte contre cette solitude est le cœur de l’action de la Société Saint Vincent de Paul. Jeunes ou âgés, malades ou bien portants, retraités, salariés, étudiants ou chômeurs, en situation de précarité ou non : les profils des individus qui progressivement se sont sclérosés dans une solitude extrême sont variés. L’isolement fait d’eux des invisibles. Pour les rendre à nouveau visibles ce sont les yeux du cœur plus qu’aucun autre qui semblent primordiaux.

La visite à domicile

A l’époque d’Ozanam, les personnes démunies sont admises à des « guichets de charité ». Avec ses amis, il révolutionne ce système en décidant d’aller à la rencontre des pauvres, en se rendant chez eux.

Ainsi, la visite à domicile reste-elle l’action phare de la SSVP, depuis sa création. Elle repose sur la conviction de Fréderic Ozanam que « L’assistance humilie quand elle prend l’homme par le bas. L’assistance humilie si elle n’a rien de réciproque ! » Aujourd’hui, encore, alors que l’administration paraît toujours plus inaccessible et déshumanisée, les bénévoles sont accueillis par les personnes qu’ils accompagnent. Ainsi deviennent-ils des hôtes, invités de ceux qu’ils aident. Des conditions propices aux principes de respect et de réciprocité nécessaires à la construction d’une relation authentique et durable. Au fil du temps c’est un lien personnel et profond qui se tisse entre visiteurs et visités : un moyen concret de lutter contre la solitude et le repli sur soi.

Au fil du temps, c’est un lien personnel et profond qui se tisse entre visiteurs et visités.

Que ce soit à domicile, en maison de retraite, à l’hôpital ou en prison, les membres de la SSVP accompagnent les personnes là où elles vivent. C’est dans ce contexte que peut s’établir une aide au plus proche des besoins réels des personnes accompagnées, selon leur environnement – matériel et humain – et selon leurs choix de vie.

Un principe de subsidiarité

La SSVP agit toujours localement : au cœur des quartiers, dans les villes et les villages. Les bénévoles œuvrent près de chez eux, auprès des « invisibles » qui leur sont proches, selon le principe de subsidiarité qui restitue à chacun la responsabilité sociale d’agir à son niveau.

Les bénévoles sont regroupés en équipe fraternelles, appelées conférences. Chacune compte entre 3 et 20 membres. C’est ensemble qu’ils agissent et initient des actions locales ciblées : aide aux devoirs, soutien scolaire, distribution alimentaire ou vestimentaire, soutien médical, aide administrative, jeux, tricots, cuisine… S’il arrive que cette aide soit matérielle : nourriture ou autre, elle est surtout un vecteur à l’aide véritable qui réside dans le soutien humain et spirituel. Ces initiatives ont le plus souvent lieu à domicile mais elles peuvent aussi être l’occasion de retrouvailles dans des espaces communs : salles paroissiales ou communales, lieux de rencontres et de partage.

Rapprocher, remailler, renouer, raccommoder, réconcilier… autant de termes qui décrivent l’ouvrage « cousu-main » tissé par chacune des 51 000 conférences qui œuvrent à travers le monde. Un travail de cohésion sociale, au quotidien, près de chez soi, pour redonner vie et humanité, afin que personne ne soit effacé par l’indifférence.

Un réseau organisé

La conférence est l’élément de base de l’organisation de la Société Saint Vincent de Paul. Chaque conférence est attachée à une paroisse ou une institution déterminée (établissement scolaire ou autre) et sous la responsabilité d’un président. Plus que «la présidence», ce dernier a des fonctions d’animation et de coordination, comme pourrait l’être un chef d’orchestre. Ces présidents sont eux-mêmes coordonnés par des présidents départementaux, puis nationaux. Chaque conférence, de même que toutes les antennes départementales et nationales, est accompagnée par un aumônier, prêtre, diacre, religieux ou laïc.

La conférence est le pivot de toutes les initiatives locales, à la fois soutien et levier d’action. La subsidiarité et la complémentarité commence au sein des conférences, notamment grâce aux talents et compétences de chacun. Ainsi certains seront-ils plus enclins à dispenser des cours, d’autres à faire de la cuisine, d’autres encore à jouer au scrabble.

Des moments de retrouvailles sont proposés dans des espaces communs : salles paroissiales ou communales, lieux de rencontres et de partage.

Les conférences sont elles-mêmes des lieux d’entraide où les bénévoles font eux aussi l’expérience du lien fraternel et amical qu’ils sont invités à tisser avec les personnes qu’ils accompagnent. Elles apportent un soutien moral, matériel et spirituel autant à leurs membres qu’aux personnes visitées. C’est au sein même des conférences que les bénévoles se forment et nourrissent leur foi, pilier de l’action vincentienne.

Une règle internationale

Toutes ces équipes diffèrent les unes des autres, chacune d’elle est unique, mais toutes sont régies et ainsi unies par une charte commune. Cette règle, internationale, est un « ensemble de principes, de règlements et de recommandations, destinés à aider les membres de la Société de Saint-Vincent de Paul à vivre leur engagement selon l’esprit et les traditions de l’association ». Elle s’appuie sur l’œuvre et la spiritualité de Saint Vincent de Paul qui a, par son dévouement auprès des plus pauvres, profondément marqué la société française du XVIIème siècle.

Pour vivre de ces valeurs, chaque conférence se réunit régulièrement, au moins une fois par mois, au mieux une fois par semaine. Ces réunions sont d’abord des lieux de spiritualité, mais aussi des lieux de partage. La parole est libre mais confidentielle, afin que tous les membres puissent évoquer ce qui concerne les familles accompagnées mais aussi les difficultés que chacun d’eux peut rencontrer.

Des bénévoles catholiques mais pas seulement

La majorité des bénévoles est catholique mais pour autant ces derniers n’ont pas l’exclusivité. Toute personne désireuse de se mettre au service des plus fragiles, et respectueuse des principes qui régissent l’association est la bienvenue. Aussi, certains bénévoles sont protestants, d’autres musulmans, d’autres encore sans confession, mais tous œuvrent ensemble, conjointement et durablement avec une seule devise : « aimer, servir et partager », qu’ils conjuguent à tous les temps.

La lutte contre la solitude est le cœur de l’action de la Société Saint Vincent de Paul et celle-ci touche tous les âges.

L’une des ambitions de la SSVP est que les personnes aidées puissent, un jour, si elles le désirent, devenir aidantes. A leur tour, elles peuvent soutenir et aider des personnes qui en ont besoin, devenant les maillons d’une chaine de solidarité.

La Société Saint Vincent de Paul dans le Var

Dans le Var, 225 bénévoles, hommes et femmes, sont engagés dans l’association, répartis en 21 conférences, dont 10 à Toulon.

L’actuelle présidente, et ce depuis deux ans et demi, est Paule Olczak. Jeune retraitée, engagée depuis 2008, date à laquelle elle a fondée la conférence de Cuers avec deux paroissiennes, pour, dans un premier temps, venir en aide à une personne en extrême précarité. S’organiser en équipe, selon la règle de la SSVP leur a permis de développer une action juste, durable et nourrie par la spiritualité. Un garde fou contre la toute puissance, et la suffisance. Aujourd’hui la conférence de Cuers compte 18 membres. Et parmi eux le mari de Paule, Franck, et leur fille : une histoire de famille, au sein de la grande famille vincentienne.

« Vincentien d’un jour, vincentien pour toujours » est l’une des maximes que l’on entend de nombreux membres de la SSVP. Plus qu’un engagement supplémentaire, il s’agit pour eux d’un mode de vie, une manière de donner corps à leurs convictions spirituelles – et/ou humaines, qui les protège d’une certaine dissociation et les aide à être pleinement catholiques – et/ou pleinement humains. Vivre ce compagnonnage avec les plus fragiles donne un sens à leur existence. Par ces rencontres ils prennent conscience des vraies richesses, qui ne sont pas matérielles : la joie de donner et de recevoir, le plaisir d’une rencontre, le bonheur d’être ensemble…

Ces relations tissées dans la réciprocité sont source d’enrichissements mutuels. Visiteurs et visités sont restaurés dans leur humanité, par des gestes simples, gratuits et toujours authentiques : des portes qui s’ouvrent, des mains tendues, des sourires, des confidences, des regards qui relèvent et qui élèvent.

Une œuvre généreuse

« Tout ce qui n’est pas donné est perdu. » Un proverbe qui conviendrait à tous ces bénévoles qui perpétuent les œuvres de Saint Vincent de Paul et Fréderic Ozanam. Mais aussi à tous les généreux donateurs qui permettent à la SSVP de vivre, puisque financée en quasi-totalité par des particuliers.

L’antenne Varoise de la Société Saint Vincent de Paul est en quête de toujours plus de générosité. Quels que soient vos moyens, quels que soient vos talents et vos compétences, que vous ayez envie de rencontres ou de rendre un service administratif, votre contribution compte : il y a de la place pour tous !

En 1836, Frédéric Ozanam, fondateur de la société Saint-Vincent-de-Paul écrivait ces mots :

« La question qui agite aujourd’hui le monde autour de nous n’est ni une question de personnes, ni une question de formes politiques, c’est une question sociale. C’est de savoir qui l’emportera de l’esprit d’égoïsme ou de l’esprit de sacrifice ; si la société ne sera qu’une grande exploitation au profit des plus forts ou une consécration de chacun au service de tous. Il y a beaucoup d’hommes qui ont trop et qui veulent avoir encore ; il y en a beaucoup plus d’autres qui n’ont rien et qui veulent prendre si on ne leur donne rien.

Entre ces deux classes d’hommes, une lutte se prépare et elle menace d’être terrible : d’un côté la puissance de l’or, de l’autre la puissance du désespoir ».

Jasmine de Dreuzy, reporter bénévole pour Iota.

Pour aller plus loin :

https://rcf.fr/vie-quotidienne/famille/societe-saint-vincent-de-paul

https://www.ssvp.fr/reseau/conseil-departemental-du-var

Pour info : un pèlerinage vincentien prêché par Gilles Rebêche aura lieu à Lourdes cet automne.


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