En route vers la Providence

Il était question, au départ, d’un pèlerinage depuis Paris, jusqu’à Jérusalem. Deux jeunes femmes, deux sacs à dos, deux vélos et en avant ! La crise COVID et les mesures sanitaires qui l’ont accompagnée ont quelque peu bouleversé la donne. Il a fallu s’adapter et changer les plans. Récit d’un parcours atypique qui a mené deux étudiantes en école d’art parisienne à rejoindre les équipes de l’Union Diaconale du Var.

Étudiantes en dernière année de direction artistique à l’école Penninghen, la prestigieuse école de direction artistique et d’architecture intérieure de Paris, Jeanne de Puybeaudet et Sixtine de Préval, 23 ans chacune, ont eu envie, l’année dernière, de prendre un peu de recul avec la course aux hautes études dans laquelle elles s’étaient lancées. Diplôme BAC + 5 en poche, il était temps de s’évader un peu. « Nous en avons toujours eu envie, avoue Jeanne. J’ai deux amis qui ont fait Paris-Jérusalem à pied et quand elles en sont revenues et m’ont raconté, j’avais les yeux pleins d’étoiles ». « J’adore voyager, marcher, visiter mille lieux, confie Sixtine. Je tiens ça de mes parents avec lesquels j’ai beaucoup voyagé dès toute petite. Et comme le marché de l’emploi n’était pas au beau fixe après le premier confinement du printemps 2020, nous avons décidé de nous offrir quelques mois de temps suspendu ». Le périple se fera à vélo. Départ de Paris le 16 octobre 2020. Pour le logis et la nourriture ? Les rencontres et les bonnes volontés s’en chargeront. « Nous roulions la journée et nous faisons du porte à porte le soir, raconte Jeanne. Ou bien nous rencontrions des âmes charitables dans les lieux de vie des villages que nous traversions. En engageant la conversation et en racontant notre histoire, les gens se proposaient naturellement de nous héberger. Une seule fois nous n’avons pas trouvé où loger et nous avons dû nous rabattre vers une auberge de jeunesse ».

« La pauvreté n’est pas que financière »

Hiver 2020. Le deuxième confinement est annoncé. L’affaire se complique. Les lieux de vie et de partage des villages traversés se ferment. Les rencontrent se font moins. A Montélimar, les deux baroudeuses sont quelque peu bloquées… Proche de Monseigneur Rey, Jeanne l’appelle. L’évêque de Fréjus-Toulon la met en relation avec Gilles Rebèche, diacre délégué diocésain à la solidarité dans le Var et fondateur de l’Union Diaconale du Var. Celui-ci les oriente vers Les Amis de Jéricho, où un projet de fresque est en suspens et un accueil migrant piloté par le Secours Catholique est en création ainsi que vers le Jardin solidaire de la Castille, en pleine réfection. « Nous avons d’abord été bénévoles puis nous sommes passées sous le statut de volontaire civique », explique Sixtine. L’idée étant de s’appuyer sur les compétences des deux jeunes femmes. Avec l’aide de personnes accueillies des Amis de Jéricho, elles viennent donc d’achever une magnifique fresque qui s’étend sur toute la partie gauche du couloir d’entrée de l’association et des peintures à l’intérieur des locaux en guise de signalétique (voir photos ci-dessous).

Au-delà de l’aspect esthétique, ces créations ont bien entendu permis de nouer des liens. « Leur présence a été un vrai rayon de soleil », insiste Barbara Kervadec, la directrice des Amis de Jéricho. « Je crois que nous pouvons dire que nous nous sommes fait des amis ici, glisse Jeanne. Nous avions soif de rencontres, de lien social, de partage et de don. Cette fresque, nous ne l’avons pas faite seule. Des personnes accueillies aux Amis de Jéricho, notamment Candy, nous ont beaucoup aidées. L’UDV, c’est une respiration humaine avec des gens francs et cela fait du bien. On se rend compte, en étant engagées comme ça, que la pauvreté n’est pas que financière. Ces personnes ont besoin d’affect, d’amitié, de rapports humains tout simplement ».

Direction Rome

Présentes avenue Colonel Picot les mardis et mercredis, les deux jeunes femmes interviennent dans le futur accueil migrant du Secours Catholique chaque jeudi et vendredi matin et à la Chapelle de l’Immaculée Conception, à Toulon, où elles sont logées. Elles sont en train d’y achever une fresque dans le sanctuaire de Marie qui défait les nœuds (voir photos ci-dessous).

Et le pèlerinage jusqu’à Jérusalem dans tout ça ? Il a pris du plomb dans l’aile mais l’idée n’est pas totalement abandonnée. Elle est juste transformée. Jeanne et Sixtine quitteront Toulon fin mai direction Rome. À pied cette fois. Toujours en comptant sur les bonnes âmes pour le logis et le couvert. Et après ? Après… « Nous verrons bien » nous disent-elles en cœur. Qu’il en soit ainsi !


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